Je la regarde. De loin. Comme toujours. Elle ne sait sans doute pas que j'existe. Sûrement parce que je sais que je suis trop timide pour l'approcher. Elle est un Soleil, d'une beauté qui me coupe le souffle.

D'ici, je distingue parfaitement ses traits qui me font rêver. D'ici, j'entends son rire cristallin, réaction à une blague de Rosalya, laquelle me jette parfois des regards appuyés. Elle connait mes sentiments pour son amie. Je ne sais pas si j'ai été trahi par mes coups d'oeil, ma timidité en sa présence, ou le fait que je l'ai fuie encore et encore, mais Rosi n'a eu de cesse de me harceler, jusqu'à ce que je ne puisse plus me taire. Depuis, je fais un peu plus attention, tout en tentant d'esquiver les assauts d'une furie aux cheveux blancs, qui veut à tout prix que je me déclare.

Mes mains caressent la couverture de mon carnet. "Tu devrais y faire plus attention". Depuis qu'elle m'a dit cela, je ne l'ai plus jamais perdu ou oublié. Je l'ouvre sur une page vierge. Castiel aussi a remarqué les sentiments que je lui voue. Il dit que je n'écris plus que sur la tristesse et l'amour, mais que ce n'est pas un problème parce que ça plait aux fans.

Je me mords la lèvre pour réprimer la jalousie qui me ronge soudain. Nathaniel a posé la main sur son épaule. De l'autre, il lui tend un papier. J'entends les mots "Castiel" et "justificatif". Je me laisse retomber contre l'arbre avec un fin sourire. J'observe ma muse, qui fronce les sourcils, répond sèchement et détourne la tête. Le ton monte. Soudain, les yeux brillants de fureur et de larmes naissantes, les joues rouges, elle gilfe puissamment le délégué. Son coup est si fort que la tête du blond part sur le côté. Mon sourire disparaît aussi vite qu'il est venu. Elle est offensée, à mi-chemin entre la colère et la tristesse. Tout ça à cause d'un certain blond qui pense que tout lui est dû. Il est délégué principal des élèves, certes, mais ça ne fait pas de lui un prince.

Je résiste à la tentation d'aller la réconforter. Elle ne me connait pas après tout. Je n'existe pas à ses yeux. Je le sais.

Je la regarde encore. Elle court vers Alexy, se cachant le visage avec se mains. Il l'entoure de ses bras en lui murmurant quelques mots à l'oreille. Mais je ne suis pas jaloux, cette fois. Je sais qu'Alexy ne s'intéresse pas aux fille, pas de cette façon. Mais alors qu'il l'apaise, mon seul souhait est d'être à sa place.

Je soupire. La journée de contemplation qui m'attend ne m'enchante pas. Mes yeux piquent un peu. Lassitude, tristesse ? Sans doute un mélange des deux. Castiel et Rosalya ont beau m'y encourager, je ne parviens pas à faire un pas vers elle.

Je ferme les yeux un instant. La regarder sans rien faire me torture. Je voudrais tant oser agir. Je maudis la timidité qui me paralyse.

Je sens que quelque chose se place entre moi et le Soleil. J'ouvre lentement les yeux. Je vois d'abord Castiel, Rosalya et Alexy, au fond de la cour, qui sourient. Puis, je croise le regard de ma chère muse, infiniment plus près. La peau sous ses yeux est encore meurtrie par ses larmes récentes, mais ça ne change rien à la douceur de son regard, qui m'hypnotise. Ses prunelles magnifiques plongent dans les miennes. Elle sourit, presque avec tendresse.

- Lysandre...

Je souris à mon tour, rougissant. On dirait bien que j'existe un peu, au final.